Actualités | Publier le 13 octobre 2021
Pénurie de chauffeurs : quel bilan?
La crise sanitaire de 2020 a engendré bien des maux sur la chaîne logistique, à commencer par les déséquilibres d’offre et de demande résultant des confinements asynchrones des différentes zones du globe. Ces déséquilibres ont entraîné des pénuries de containers et, par corollaire, une hausse inédite des taux de fret maritime qui ont fait couler beaucoup d’encre parmi bon nombre d’acteurs de la supply chain mondiale.
Une autre conséquence de cette crise sanitaire, dont on a encore peu parlé, c’est la pénurie de main-d’œuvre, notamment dans tout ce qui touche au transport routier. Une pénurie qui s’explique par de nombreux facteurs que nous allons vous lister au cours de cette actualité.
Un phénomène connu mais plus accentué qu’à l’accoutumée
Le manque de main d’œuvre dans le secteur est relativement courant, parfois saisonnier aussi, mais il n’étonne guère car le taux de postes vacants reste souvent le même. Cependant, avec la crise sanitaire, cette pénurie se fait ressentir beaucoup plus qu’avant. La faute à de nombreux facteurs qui ont engendré, à la fois une pénurie vis-à-vis de l’image du métier en lui-même, mais aussi vis-à-vis des phénomènes liés à la pandémie qui ont déréglé les rouages de la logistique mondiale.
En ce qui concerne les problèmes d’image, c’est un phénomène connu qui ne demande qu’à changer. En effet, bon nombre de clichés circulent à propos des métiers du transport, notamment des chauffeurs routiers qui sont souvent cantonnés à une image faussée que nous n’évoqueront pas ici. Le fait est que, contrairement à l’image que l’on donne au métier de chauffeur, c’est pourtant un métier valorisant, technique et qui est en somme toute très respectable.
Le chauffeur routier est l’un des maillons de la supply chain les plus importants. Il n’y a qu’à voir lorsque les grèves de chauffeurs routiers se mettent en place, on a un phénomène de pénurie diverses et variées qui se font ressentir en un rien de temps, notamment avec le carburant. De fait, le métier de chauffeur routier est pourtant quelque chose de très technique. Savoir conduire des engins de plusieurs tonnes, à travers un pays voire plusieurs relève d’un sacré challenge.
Être chauffeur ne consiste pas à attendre sa marchandise et simplement rouler en faisant attention à ne pas avoir d’accident. Il faut, en relation avec son dispatch vérifier les accès pour son véhicule, respecter les plages horaires, vérifier l’état de sa marchandise, respecter les temps de conduite, bien arrimer sa marchandise, et l’on ne parle pas des divers transports en convoi exceptionnels qui nécessitent une attention technique encore plus poussée.
Sans chauffeurs routiers nous n’aurions pas nos frigos remplis, nos pleins d’essence fait régulièrement, nos commandes sur Internet livrées en 24/48h ou encore, de manière plus large encore, nos entreprises qui fonctionnent. Si vous supprimez ce maillon de la chaîne, c’est un véritable retour au moyen-âge qui s’opère. Les usines ont besoin de leurs matières, les petits commerçants aussi, et le consommateur tout autant.
Ce souci d’image, véhiculé par bon nombre de fausses idées depuis des années, est aussi un travail d’éducation et de communication qui doit être mis en place par les différents acteurs liés au recrutement et la formation. Ceux-ci doivent pouvoir montrer que le métier de chauffeur routier est un métier qui se veut complet, technique et bien plus valorisant que veulent le faire croire les clichés fleurissant un peu partout.
Enfin, l’image du camion doit elle aussi être bien remise en lumière. Exit les camions vieillots et inconfortables, les camions de nos jours sont de plus en plus modernes, équipés de toutes les technologies, qu’elles soient liés à la navigation ou la sécurité, le camion d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec ceux des années 90, et les normes énergétiques les concernant évoluent grandement qui plus est.
Enfin, et c’est un réel plus, le métier de chauffeur routier n’est pas un métier masculin, il n’est pas genré et une femme peut tout autant qu’un homme conduire un poids lourd. Il y a là aussi, un travail de communication qui doit se mettre en place, assorti d’un travail de formation, pour que ce corps de métier puisse être ouvert à tous sans aucune distinction. En effet, c’est en ouvrant ce métier à tout le monde, que l’on peut justement endiguer les pénuries de main d’œuvre.
Cependant, au-delà de l’image, il y a d’autres phénomènes expliquant en partie ces histoires de pénuries.
Une politique internationale peut entraîner une pénurie
Phénomène que peu avaient vu venir, la politique migratoire en termes de travail peut elle aussi avoir son lot de conséquences sur le nombre de postes vacants. L’exemple le plus concret et actuel est celui lié au Royaume Uni et son fameux Brexit.
En effet, avec un vote massif, souvent lié, malheureusement, à une forte volonté de sortir de l’UE pour des questions migratoires, force est de constater que le phénomène se retourne contre les britanniques, qui, par leur peur de se faire voler leur travail par d’autres pays de l’UE, se sont vite retrouvés le bec dans l’eau au moment où l’économie a commencé à repartir.
Il faut dire que le Brexit s’est déroulé quasi en même temps que la crise sanitaire, de fait, la pénurie ne s’est pas ressentie de suite pour nos voisins britanniques. Une fois que l’économie est repartie à la hausse, les conditions d’entrées et de sorties du pays ont considérablement ralenti la donne, mais bien au-delà de cela, beaucoup d’étrangers sont rentrés chez eux ou sont allés dans d’autres pays de l’UE. C’est ainsi, et beaucoup d’articles de presse le relatant, que nous avons pu constater que le Royaume Uni a perdu énormément de main d’œuvre depuis sa sortie de l’Union Européenne.
Il n’est pas rare que certains corps de métiers soient prisés par des communautés provenant de pays étrangers. C’est en quelque sorte une logique liée aux flux migratoires. Beaucoup de secteurs nécessitant énormément de main d’œuvre, trouvent ressource au sein des travailleurs étrangers qui peuvent, dans des métiers très manuels, trouver rapidement une source de revenus. Si vous changez vos politiques liées aux travailleurs étrangers, et que justement, vous limitez leur accès, ces travailleurs vont aller là où on leur permet de travailler facilement, et donc quitter la zone en question.
C’est en quelque sorte un péché d’orgueil des britanniques que d’avoir voulu croire que le Brexit rendrait, soi-disant, des emplois aux résidents du pays. En vérité, bon nombre de Britanniques laissaient ces emplois aux nouveaux arrivants, c’est un phénomène pourtant connu qui se répète à travers l’histoire (et qui a véhiculé bon nombre d’à priori sur les corps de métiers et les nationalités). Ainsi, le Royaume Uni tente actuellement d’assouplir de nouveau sa politique migratoire, en rallongeant les visas et en encourageant les travailleurs étrangers à revenir sur leur sol pour y travailler. Et parmi les corps de métiers les plus en manque, il y a justement celui de chauffeur routier (ainsi que tous les personnels officiant dans les entrepôts).
Une pénurie liée aussi à une évolution des mentalités
Autre point expliquant cette pénurie, c’est une évolution des mentalités par rapport au métier de chauffeur routier. On estime qu’en France il y a environ 300 000 chauffeurs routiers (tout type de transport confondu) dont 3% sont des femmes.
La population de ce secteur est vieillissante et masculine, on est sur une tranche dominante des + de 50 ans, autrement dit, la pénurie ne peut qu’augmenter si on ne renverse pas la donne. Il faut dire que l’image du métier a bien souvent été écornée à tort, comme nous l’évoquions plus haut. Pourtant, c’est un métier qui est valorisant et bien loin des images nauséabondes que l’on voit fleurir partout dans les médias.
Ce phénomène est mondial, le taux de renouvellement suite aux départs à la retraite est très faible, la faute à une évolution des mentalités qui fait que de moins en moins de personnes souhaitent s’éloigner de leurs proches durant des jours voire des semaines. Il faut bien sûr être conscient que le métier de chauffeur peut impliquer de découcher et donc de ne rentrer chez soi qu’après plusieurs jours. Certes, ces absences sont largement compensées sur le plan financier, mais elles restent une contrainte pour beaucoup qui souhaitent de plus en plus rester proches de leurs familles. D’autres encore, n’y voient plus le sentiment de liberté lié aux localisations des véhicules par satellite, là encore, une idée fausse puisque le chauffeur d’antan, ne pouvait pas forcément s’amuser à flâner sur les routes comme bon lui semblait. Une sorte de peur d’être “fliqués” qui pourtant, est quelque chose qui n’est pas nouveau, bien que modernisé, et en somme toute logique compte tenu du métier. Là encore, un effort de communication doit être fait par les différents acteurs de formation et de recrutement du secteur pour “séduire” de nouveaux profils.
Enfin, il y a aussi les notions de charges de travail qui freinent de plus en plus les nouveaux arrivants. Parfois un chauffeur peut travailler 60 heures par semaine, avec le salaire qui suit toutefois, mais beaucoup décrochent face à ce nombre d’heures. Pourtant, plus il y aura de chauffeurs, et moins les semaines pourront être chargées, ces heures de travail très étendues ne sont que la résultante aussi du manque de main d’œuvre actuel.
Une pénurie aussi liée à un rebond d’activité soudain
Enfin, dernier point expliquant cette pénurie, c’est tout simplement le sursaut, au niveau mondial, du consumérisme ambiant. Si déjà la consommation avait engendré un élargissement du capacitif mondial de la supply chain, il est compliqué parfois de suivre en totale synchronicité la demande vis à vis de l’offre.
Les navires sont de plus en plus gros, les usines fonctionnent à plein régime et les sites internet de vente en ligne fleurissent, entraînant des augmentations des volumes des entrepôts et obligent bon nombre de terminaux portuaires à investir en masse pour pouvoir décharger dans les temps les énormes navires remplis parfois de plus de 20 000 EVP. La cadence est dure à suivre pour tout le monde, et forcément, on ne peut pas augmenter les volumes des camions, de fait, avec une demande toujours croissante et un nombre de chauffeurs en berne, cela engendre, en tout état de cause, une pénurie.
On aurait pu penser que la crise sanitaire pouvait réduire la dépendance des pays vis à vis de la Chine, mais, bien que cela ait été mis en lumière, et ait persuadé certains grands groupes d’envisager des relocalisations d’unités de production dans d’autres zones du globe, le continent asiatique reste leader et fonctionne à plein régime. Si les navires sont de plus en plus gros, et que certains terminaux sont modernisés, il y a toujours une supply chain dont les rouages sont grippés par la crise sanitaire, et ce, dans tous les maillons de la chaîne.
Bon nombre d’armateurs sont en attente de nouveaux navires, tandis que la pénurie de conteneurs peine à se résorber. Les délais rallongent, les terminaux portuaires éprouvent des retards dans leur modernisation, les congestions portuaires aussi, et la régularité des flux de marchandise ne se fait plus et qui plus est, elle est parfois imprévisible. Tout cet ensemble de phénomènes entraîne donc, un manque de camion pour parvenir à assurer les rotations comme il se doit, que ce soit en pré-acheminement ou en post-acheminement.
Une situation malheureusement compliquée et difficilement maîtrisable pour beaucoup, qui tend à se résorber peu à peu en 2023 pour certains économistes et spécialistes.
Comment remédier à cela?
Il est compliqué de pallier efficacement un phénomène dépendant de si nombreux facteurs. Toutefois, au-delà des irrégularités engendrées par la crise sanitaire, qui va tôt ou tard se résorber, il y a un travail de fond qui doit être fait par tous les acteurs du transport pour séduire de nouveau la nouvelle génération.
Comme nous le disions, le métier de chauffeur n’a rien à voir avec les clichés péjoratifs véhiculés par d’anciennes générations et médias de toute sorte. C’est un métier essentiel qui nécessite bien plus qu’avoir un bon tour de volant dans les bras. Les conditions de travail sont régulées, les camions sont très modernes, et l’on est en permanence en lien avec son équipe de dispatch pour assurer efficacement ses tournées.
C’est un véritable travail d’équipe qui se met en place entre chauffeurs, manutentionnaires et dispatchs. On optimise les tournées, on anticipe les conditions météos et les retards, on a un travail technique sur l’arrimage des marchandises, le contrôle de celles-ci mais aussi le contrôle de son véhicule. Enfin, le métier de chauffeur routier c’est aussi une communauté bienveillante qui communique énormément pour s’aider sur la route, et ce, même si vous n’êtes pas dans la même société. Il y a un réel respect du métier qui se fait, et les nouvelles générations qui y travaillent le voient très vite quand elles mettent le pied dedans.
C’est aussi un métier varié qui peut vous pousser à découvrir de nombreuses choses. On peut conduire aussi bien du container que du véhicule ou des palettes en passant par du convoi exceptionnel nécessitant une réelle compétence technique encore plus poussée. Sans chauffeurs routiers tout entre en pénurie, et ça, la supply chain le sait bien.
Si certaines choses ont tendance à freiner les nouveaux entrants, il faut aussi comprendre que plus il y aura de chauffeurs, et plus certaines de ces raisons vont s’effacer car elles sont intimement liées à la pénurie de main d’œuvre actuelle.
On ne le dira jamais assez, le métier de chauffeur routier, quelque soit votre provenance ou votre genre, est un métier important et essentiel. Si vous envisagez d’entrer dans cette aventure, n’hésitez pas à contacter vos organismes de formation les plus proches.
Et si vous avez vos formations en poche, n’hésitez pas à consulter notre page recrutement pour voir si nous n’avons pas besoin d’un ou plusieurs chauffeurs, homme ou femme, au sein de notre flotte. N’oubliez pas que tout métier a une valeur et requiert des qualités chez ceux qui le pratique.